Alphonse de Lamartine

Lettre autographe signée, sans lieu, [1836], 1 page in-8°.

Très belle lettre dans laquelle le poète répond à l'article d'un critique sur Jocelyn et lui fait une observation sur le fait d'extraire seulement « deux ou trois fragments » qui ne peuvent rendre l'esprit général de Jocelyn.

Il mentionne deux de ses œuvres les plus célèbres (les Méditations poétiques et les Harmonies poétiques et religieuses) pour appuyer son propos : « Il y a dans les Méditations désespoir et dans les Harmonies Novissima verba cent fois plus fort que dans le morceau sur les résolutions de Jocelyn. e pur si muove. »

Ce n'est pas la première fois que l'on reproche à Lamartine une attaque au christianisme dans Jocelyn. Dans une lettre adressée à son cousin germain, le baron Alexandre Carra de Vaux, il faisait part de cette mauvaise compréhension : « […] Tu partages donc à tort l'erreur commune qui m'attribue l'intention d'hostilité envers le christianisme dans ceci ou dans Jocelyn. Je suis chrétien à peu d'interprétation près. Le peu de bien qui est en nous vient de là, et je vénérerai toujours la source où nos âmes ont tout puisé. […] » (Correspondance de Lamartine, tome V, DCLXXVIII)

Également, dans le post-scriptum des éditions précédentes que l'on retrouve dans les Œuvres complètes de Lamartine (1860), le poète clarifiait ses intentions : « […] Quelques personnes ont cru voir dans Jocelyn deux intentions du livre sur lesquelles l'auteur doit s'expliquer : un plaidoyer contre le célibat des prêtres ; une attaque à la religion : ces personnes sont dans l'erreur. […] Quant à une attaque au christianisme catholique, ce serait méconnaître également et l'instinct du poëte et le tact moral de l'homme, que de supposer une intention de polémique hostile dans un ouvrage de poésie pure, dont l'unique mérite, s'il en avait un, serait le sentiment moral et religieux dont chaque vers est imprégné. […] »

J'ai lu l'article et vous remercie de ce qu'il y a d'amical et de bon au milieu de la critique obligée.

Seulement je vous ferai une observation. C'est que si vous ne prenez dans l'ouvrage que les
deux ou trois fragments où il y a selon vous à réprouver, vous ne rendrez pas l'esprit général,
l'impression d'ensemble du livre que lit tout Chrétien et moralisante sans nuances. Il y a dans les Méditations désespoir et dans les Harmonies Novissima verba cent fois plus fort que dans le morceau sur les résolutions de Jocelyn. e pur si muove.

Mille amitiés
Lamartine