Charles-Ange Laisant

Lettre autographe signée, Versailles, 17 juin 1876, 2 pages, sur papier à en-tête de la Chambre des Députés, à Benjamin Laisant.

Intéressante lettre à son père dans laquelle il mentionne la « grande faute » de Gambetta relative au service militaire obligatoire.

Le 26 juin 1871, Léon Gambetta s'exprimait en disant « Que pour tout le monde il soit entendu que quand en France un citoyen est né, il est né soldat ». Charles-Ange Laisant se fait connaître pour ses propositions en tant que député républicain radical afin de réduire le service militaire à trois ans. En effet, la loi Cissey de 1872 réinstaure le service national obligatoire par tirage au sort ; celui-ci pouvait durer de 6 mois à 5 ans. En 1905, la durée sera portée à 2 ans puis 3 ans en 1913.

Il continue sur l'état de santé de sa femme Cécile. Face aux coût d'un éventuel placement dans un établissement, il envisage même d'abandonner son mandat de député « pour [se] mettre à gagner de l'argent. »

Il termine sur une note politique avec les élections sénatoriales de 1876 au cours de laquelle Louis Buffet fut nommé sénateur inamovible. Victor Hugo sera également nommé sénateur au cours de la même session.

[Versailles, le] 17 Juin [187]6

[en marge, de la main de Benjamin Laisant: R, le 18 juin.]

Mon cher père,

Je suis accablé par la correspondance surtout depuis mon interpellation et la discussion de ma loi des 3 ans, dans laquelle Gambetta a fait une si grande faute.

Cécile ne va pas mieux. Il faut absolument que j'en vienne à la placer en traitement. J'ai visité plusieurs établissements. Le seul abordable est le pensionnat départemental de Ville Evrard. C'est une affaire de 3000 fr. par an avec les faux-frais. Comme j'arriverais tout juste à équilibrer mon budget avant d'être dans cette épouvantable période, il en résulte que je vais me trouver terriblement embarrassé désormais. Enfin, je ferai le possible ; et s'il est nécessaire, j'abandonnerai le mandat de député, pour me mettre à gagner de l'argent.

Je te remercie des N°s du Corsaire que tu m'as adressés.

L'élection de Buffet au Sénat n'est pas un désastre. Je crois que dans l'avenir, elle fera plus de mal au Sénat qu'à personne.

Nous reconstituons l'Union Républicaine.

Je t'embrasse ainsi que ma mère.

Ton fils et ami
CALaisant