Charles-Ferdinand d'Artois, duc de Berry

Lettre autographe signée, Paris, 18 avril 1816, 2 pages in-4°, à un cousin.

Touchante lettre relative à son mariage avec la princesse Marie-Caroline de Bourbon-Siciles dans laquelle il fait allusion à sa séparation avec Amy Brown et leurs deux filles.

Le duc de Berry exprime sa reconnaissance envers son cher cousin pour sa lettre aimable. Il reconnaît son amitié sincère et sa volonté de bonheur à l'occasion de son mariage. Il réalise que son cousin a la chance de vivre dans un pays où rien ne le retient après les malheurs qu'il a endurés et fait mention de son « devoir bien pénible » qui « [le] sépare ou du moins [l'éloigne] de tout ce qui [lui] était cher ».

En effet, en 1814, Napoléon abdique et le duc de Berry rentre en France avec ses filles, mais il est contraint de se séparer de sa maîtresse Amy Brown pour des raisons politiques. Son mariage est déclaré invalide et Amy devient une simple maîtresse.

Deux ans plus tard, le duc de Berry épouse Marie-Caroline de Bourbon-Siciles et le couple aura quatre enfants. Deux meurent jeunes, mais les deux autres, Henri et Louise, atteignent l'âge adulte. Avant de mourir, assassiné en 1820 par Louis Pierre Louvel, il demande à voir Amy et ses filles, et confie la responsabilité de prendre soin d'elles à son épouse, qui les adopte par la suite.

Ainsi, plutôt que de l'encourager à revenir en France pour son mariage, il invite plutôt son cousin à rester dans ce pays agréable où il a connu le bonheur.

Rare document.

Paris le 18 avril 1816

J'ai été bien sensible, mon bien cher cousin, à votre bonne et aimable lettre.

Je connais trop votre amitié pour ne point douter des vœux que vous voulez bien former pour mon bonheur, dans cette occasion ci. Je remplis un devoir bien pénible, qui me sépare ou du moins m’éloigne de tout ce qui m'était cher, et je vois arriver ce moment avec effroi. Je vous trouve bien heureux de pouvoir vivre encore en particulier dans un pays où au moins rien ne vous retient depuis le malheur affreux que vous avez éprouvé, et je conçois combien il doit vous être affligeant de vivre ici. Aussi bien loin de vous engager à y revenir pour mon mariage, je vous invite à rester dans ce bon pays, où l'on peut penser à son aise, et où j'ai été si heureux.

Veuillez, bien cher et bon cousin recevoir avec notre amitié ordinaire l'assurance de mon tendre et bien dévoué attachement.

Charles-Ferdinand