François Barrillot

Lettre autographe signée, Paris, 1 avril 1861, à Madame Babin-Thiébaut.

Touchante lettre de reconnaissance après les efforts faits pour lui être utile auprès d'un éditeur.

Il doit rencontrer l'éditeur Hetzel avec une lettre d'introduction de Jules Michelet. Sa correspondante lui avait demandé l'adresse de la célèbre tragédienne italienne Adelaïde Ristori, afin qu'elle puisse l'aider en remerciement des beaux vers de l'auteur la concernant mais il ne souhaite pas sacrifier sa dignité et, bien qu'il est actuellement dans la misère, il garde l'espoir de placer ses prochaines pièces.

Madame Babin-Thiébaut a fondé en 1830 l'institution de jeunes filles du 58, Quai de la Rapée.

Paris premier avril 61

Bonne Madame Thiébaut !

Je ne me suis pas trompé en incarnant en vous ma vierge du dévouement. Votre beau et grand Michelet m'a envoyé une lettre magnifique pour m'être utile au près d'un éditeur ; je suis allé en toute hâte trouver Hetzel, qui me connait de réputation sans connaître mes œuvres ; avec l'appui de Michelet il parait très disposé en ma faveur pour mon volume inédit de Triboulet, quelque lignes d'introduction de notre poète historien le déciderait.

Demain je dois lui porter ma copie, il me demande dix ou douze jours pour la lire, c'est parfait ! mais d'ici là... où irai-je ? Où Dieu voudra.

Ces jours de fêtes m'ont empécher d'aller remercier l'auteur de tant de chefs-d'œuvre, j'irai demain.

Vous me demandez l'adresse de madame Ristori je pourrai vous la donner facilement en la demandant à l'Odéon, mais, chère Madame, je devine votre intention toute chrétienne ; seulement vous ignorez sans doute que je suis le premier qui, dès ses débuts, ait chanté la grande tragédienne en beaux vers - je m'en flatte parce que la presse, en général, les a vivement applaudis - je sais qu'entre aristes on se fait service pour service, mais après tout, je n'ai rien à demander à Madame Ristori ; je suis libre de lui donner mon admiration ! Cette monaie de Dieu a cours dans tous les pays et nul ne peut la refuser ; mais l'autre ! si elle faisait rougir ! Comprennez vous, bonne Madame Thiébaut ? Du reste je laisse à votre jugement à régler cette affaire ; nous sommes tous solidaire les uns des autres. Je n'ai jamais été égoïste, la preuve, c'est qu'après 30 ans de travail manuel, et cinq ans de travail intellectuel je suis dans la misère, misère momentanée, car j'ai trois pièces de théâtre de prêtes, Dieu aidant il en sortira bien quelque chose. Chère Madame faite selon votre cœur mais, autant que possible, sauvegardez ma dignitié. Je cours de ce pas chercher l'adresse de Me Ristori et vous l'ajouterai au bas de ma lettre.

Mille remerciements de la part de votre dévoué pour la vie.

Barrillot

On joint :

Manuscrit autographe signée, titré « Le dévouement à Madame Thiebaut », sans lieu ni date, adressé à Madame Babin-Thiébaut.

Très beau poème inédit en signe de reconnaissance pour les efforts de Madame Babin-Thiébaut pour lui être utile dans sa carrière.