Georges de La Fouchardière

Lettre autographe signée, Paris, 15 janvier 1926, 2 pages in-8° sur papier à en-tête du journal L'Œuvre, à Maurice Garçon.

Intéressante lettre dans laquelle le journaliste propose une collaboration pour la rédaction d'intéressants articles écrits sous pseudonymes : « Nous proposerions cette chronique à un journal bien pensant en gardant vis-à-vis du public le secret de notre collaboration […] Tu incarnerais l'abbé Lantaigne et moi l'abbé Guitrel (ou réciproquement) ; nous entamerions sous forme de lettres adressées au journal une polémique courtoise, perfide, empoisonnée […] »

En effet, il souhaite s'inspirer pour les pseudonymes de L'Orme du mail, un roman d'Anatole France paru en 1892 qui raconte l'affrontement entre deux candidats, l'abbé Lantaigne et l'abbé Guitrel, pour l'évêché de Tourcoing.

Il termine en mentionnant le procès dans l'affaire du curé de Bonbon. Au cours de cette affaire, l'abbé Paul Desnoyer, curé de Bombon, a été flagellé le 5 janvier 1926 par une douzaine d'adeptes de la secte Notre-Dame des Pleurs de Bordeaux fondée par Marie Mesmin après un supposé envoûtement auquel il se serait livré.

La police est alertée par des villageois intrigués par un rassemblement inhabituel autour de l'église et l'événement fit grand scandale.

L'abbé Denoyer, qui porte plainte, est défendu par Maurice Garçon et, à l'issue du procès, les hommes sont condamnés à huit mois de prison ferme et les femmes à trois mois de prison avec sursis. Marie, qui n'est pas inculpée, est signalé par les psychiatres comme un danger social.

[Paris, le] 15 janvier [192]6

Mon vieux Maurice,

Ta nouvelle des « Marges » s'annonce bien, mais ta plaidoirie « En marge du dépit amoureux » est un petit chef d'œuvre...

J'ai à te proposer une collaboration qui serait une manière de mystification... que penserais-tu d'une chronique hebdomadaire sur le mode alterné, où les actualités du jour seraient traités comme des cas de conscience, et où l'abbé Lantaigne donnerait la réplique à l'abbé Guitrel ?

Nous proposerions cette chronique à un journal bien pensant en gardant vis-à-vis du public le secret de notre collaboration...

Tu incarnerais l'abbé Lantaigne et moi l'abbé Guitrel (ou réciproquement) ; nous entamerions sous forme de lettres adressées au journal une polémique courtoise, perfide, empoisonnée, dans la manière des deux personnages à qui nous empruntons nos pseudonymes. Dès le deuxième article, tout Paris serait intrigué. Qu'en penses-tu ?

À part ça, mon ménage va aussi mal que possible. Mais j'espère que tu n'auras pas à plaider contre moi.

Pierre Mille s'étant chargé de mettre en valeur tes commentaires sur l'affaire du curé de Bonbon, je n'ai pas cru devoir insister pour l'instant... Mais j'attends le procès, et je me ferai déléguer pour le compte-rendu.

Mon meilleur souvenir à ta femme et je te serre affectueusement la main.

G. de la Fouchardière