Michel Masson

Lettre autographe signée, Paris, 22 mai 1864, à un confrère au sujet de la liberté d'action nécessaire aux poètes pour la reproduction par les journaux de leurs œuvres et du rôle du Comité de la Société des Gens de Lettres en cas de litiges.

Mention de Mme Lesguillon, dite « Madame Hermance », une romancière et poétesse français qui légua, à sa mort, la quasi-totalité de sa fortune à la Société des Gens de Lettres.

[Paris, le] 22 mai [186]4

Cher confrère,

Ne cherchez plus cet inconnu qu'on attend toujours - une erreur de plume dans le relevé de nos notes m'a fait attribuer à Mr Lesguillon une pièce de vers qui appartient à un autre de nos sociétaires.

Tout ce que vous me dîtes touchant la liberté d'action nécessaire aux poètes pour la reproduction par les journaux de leurs œuvres de peu d'étendue le comité l'admet et n'y fait point obstacle ; mais encore faut-il que les journaux soient autorisés par les auteurs et que le comité soit informé de cette autorisation. Les statuts interdisent aux sociétaires le droit de faire des conventions particulières avec les journaux pour les ouvrages qui ne renferment pas au moins 1000,000 lettres et font un devoir au comité de poursuivre les journaux qui, en l'absence d'un traité, reproduiraient soit les dits ouvrages, soit des œuvres d'une étendue plus considérable comprises dans la reproduction générale.

Or le comité peut bien dans l’intérêt des poètes ne pas s'en tenir rigoureusement à la lettre des statuts ; mais il manquerait à son devoir si n'ayant pas avis d'une autorisation donnée, il passait condamnation sur des reproductions qui lui sont signalés comme illicites.

En principe le comité doit compte aux sociétaires de toutes les [...] leurs œuvres faites par les journaux reproducteurs.

Ce compte s'établit par voie de répartition régulière pour les journaux qui ont un traité et à titre d'indemnité quand il s'agit d'un journal avec lequel il n'existe pas de conventions signées.

Pour l'obtenir cette indemnité il faut la réclamer par proposition de transaction amiable et, à défaut de succès, par action judiciaire. Or la réclamation ne peut être faite qu'au nom de l'auteur or, quel rôle étrange joue le comité, si le journal peut opposer à une réclamation faite au nom et dans l’intérêt du sociétaire une autorisation de celui-ci ?

Delà la nécessité absolue de l'avis au comité quant aux noms des journaux que le sociétaire entend favoriser.

Il est bien entendu que ce qui s'applique par tolerance à la poésie, ne peut s'appliquer aux ouvrages en prose.

Je fais mettre sous presse la liste rectifiée des journaux qui ont un traité avec la société - aussitôt que l'imprimeur me l'aura livrée je m'empresserai de vous l'adresser.

Agréez l'expression de mes meilleurs sentiments
Michel Masson